La droite française maintient sa position et s’oppose à la renégociation de l’accord franco-algérien de 1968 sur l’immigration. Le parti Les Républicains a pris une initiative concrète en ce sens.
Cet accord, en vigueur depuis 55 ans, régit l’entrée et le séjour des ressortissants algériens en France. Il a été négocié et conclu pour répondre aux besoins découlant de l’indépendance de l’Algérie, six ans auparavant.
Depuis plusieurs mois, une partie de la classe politique française demande sa révocation, arguant qu’il favorise les immigrés algériens par rapport à ceux d’autres pays, qui sont soumis aux règles générales en vigueur.
Xavier Driencourt, ancien ambassadeur de France en Algérie de 2008 à 2012, puis de 2017 à 2020, a relancé cette idée dans une note en mai dernier. Elle a été immédiatement reprise par de nombreux politiciens, dont l’ancien Premier ministre Édouard Philippe.
Les Républicains ont rapidement préparé un projet de résolution appelant à la révocation de l’accord. La proposition a été officiellement déposée le 26 juin par Bruno Retailleau, sénateur et président du groupe Les Républicains au Sénat.
Dans l’exposé des motifs, le sénateur explique que sa proposition s’inscrit dans le cadre de l’objectif global d' »arrêter l’immigration de masse ».
Selon lui, l’accord franco-algérien de 1968 crée une « exception juridique » qui facilite l’immigration des ressortissants algériens vers la France.
Retailleau reprend ainsi les arguments déjà avancés par les détracteurs de l’accord, affirmant que le droit français doit prévaloir sur les accords internationaux. Il a d’ailleurs déposé une première résolution en ce sens le 25 mai.
Le sénateur évoque ensuite des chiffres pour démontrer que « le sujet est loin d’être anecdotique ». En 2021, selon l’INSEE, 887 100 ressortissants algériens étaient établis en France, ce qui en fait la première nationalité étrangère présente dans le pays, représentant 12,7 % des étrangers vivant en France.
Retailleau poursuit en citant la direction générale des étrangers en France, indiquant que l’Algérie était en 2022 le deuxième pays en termes de titres de séjour délivrés et le troisième en termes de visas accordés.
Faisant référence au contexte différent dans lequel l’accord de 1968 a été négocié, le sénateur remet en question son contenu, estimant qu’il a créé un régime juridique extrêmement favorable aux Algériens, sans justification actuelle.
La droite française veut la révocation de l’accord franco-algérien sur l’immigration. Selon Retailleau, l’accord, qui a connu trois modifications en 1985, 1994 et 2001, conserve sa « philosophie générale et sa grande générosité ».
Le sénateur des Républicains énumère ensuite ce qu’il considère comme des « facilités » accordées aux Algériens :
- Le conjoint algérien a seulement besoin d’un visa de court séjour pour entrer en France.
- Le certificat de résidence pour Algérien (CRA), valable dix ans, est automatiquement délivré après un an de mariage, contre trois ans pour les autres nationalités.
- Le CRA est délivré automatiquement aux Algériens en situation irrégulière s’ils résident en France depuis dix ans.
- Les membres de la famille obtiennent un titre de séjour similaire à celui du regroupement familial.
- Dispense de signer un contrat d’intégration républicaine et liberté d’établissement pour exercer une activité, permettant aux étudiants de rester en France après leurs études.
Pour l’auteur de la proposition de résolution, ce « droit automatique à l’immigration » est « injuste » en l’absence de réciprocité de la part de l’Algérie. Il le juge également « injustifié » car la France ne se trouve plus dans la situation d’expansion économique des années 1960, et « non mérité » en raison du refus du gouvernement algérien de coopérer sur la question des laissez-passer consulaires. Il le considère enfin « inapproprié », car il est « instrumentalisé » par les autorités algériennes comme une forme de compensation pour les années de colonisation.
Dans ce contexte, Bruno Retailleau, au nom de son parti, affirme qu’il ne se contentera pas d’une simple « renégociation », mais préconise « la dénonciation unilatérale de cet accord par les autorités françaises ».
Il est toutefois important de souligner qu’une éventuelle adoption de la résolution ne constitue pas une injonction pour le gouvernement, conformément à la Constitution. La révocation de l’accord ne peut être décidée que par l’exécutif.
L’Algérie a déjà déclaré en décembre dernier qu’elle s’opposait à la révocation de l’accord de 1968.